400.000 euros pour finir l'année.....
#97 les news de Minorque, version magazine
Minorque, c’est aussi l’Espagne. Et dans cette newsletter, je vous emmène au cœur d’une tradition solidement ancrée dans la société espagnole : la loterie de Noël, El Gordo, qui se célèbre chaque année le 22 décembre (aujourd’hui !).
Un loto ? Comme l’Euromillions ? Pas tout à fait… voire pas du tout.
Lors de chaque tirage de l’Euromillions, il y a généralement un seul gagnant (parfois 3 ou 4) qui décroche le jackpot. Rappelez-vous : le 28 novembre dernier, un couple du Haut-Rhin a empoché la somme colossale de 178 millions d’euros.
En Espagne, on joue beaucoup plus collectif. Le “gros” gain principal est de “seulement” 400.000 €… mais il y a 2 000 gagnants (400.00 € chacun). Résultat : ce n’est pas “juste” un tirage, c’est un rituel national, un spectacle, une cérémonie qui réunit familles, voisins, collègues et parfois des quartiers ou des villages entiers.
Plongeons ensemble dans le cœur de la culture espagnole…
Une expression est même entrée dans le langage courant : “me ha tocado el gordo” (“j’ai touché le gros lot ”), qu’on utilise au sens figuré pour parler d’avoir un coup de chance dans la vie. Le “Sorteo Extraordinario de la Lotería de Navidad”, surnommé El Gordo (gordo = “gros” en espagnol, ici “gros lot”), existe depuis 1812 (première édition à Cadix).
Chaque 22 décembre, des millions d’Espagnols allument la télé (premier tirage télévisé en 1962) ou écoutent la radio pour suivre le tirage en direct. Un vrai spectacle.
Le tirage démarre vers 9 h 15 au Teatro Real de Madrid, devant environ 600 spectateurs. Et le rituel est immuable depuis des générations :
Les enfants de l’école publique de San Ildefonso chantent les boules tirées, d’une voix reconnaissable entre mille.
Un enfant “chante” le numéro, un autre “chante” le gain correspondant.
D’autres élèves se relaient, car le tirage dure… près de 4 heures, avec 1 807 boules tirées !
Depuis 1960, on trouve des images liées à la religion catholique sur les tickets. À l’époque, c’était notamment pensé comme un outil de propagande pour diffuser la culture catholique.
Il existe 100.000 numéros possibles et des millions de tickets appelés “décimos”. Un décimo s’achète dans toutes les loteries d’Espagne pour 20 €, dès le mois de juillet.
Au total, les gains répartis parmi les 27 millions d’Espagnols qui possèdent un ticket atteignent 2,7 milliards d’euros(oui, milliards !).
Pour rappel, l’Espagne compte environ 49 millions d’habitants, dont 42 millions d’adultes. C’est donc 64 % des Espagnols qui achètent un décimo !
Oui, c’est un véritable phénomène de société : en moyenne, chaque espagnol dépense en moyenne 76 € pour ce tirage.
Et pour l’administration publique (Loterías y Apuestas del Estado / SELAE), cet unique tirage représente environ 30 % du chiffre d’affaires annuel!
Pourquoi tout le monde joue en groupe ?
Le fait qu’il y ait des centaines (et même des milliers) de numéros gagnants change totalement la psychologie du joueur.
Imaginez : vous êtes dans une petite entreprise, une association, un groupe d’amis, de cousins… Certains décident d’acheter le même numéro (un décimo à 20 €) et viennent vous demander si vous voulez participer. Deux options s’offrent à vous :
Acheter le billet
Ne pas acheter le billet et… potentiellement être le seul “looser” du groupe 😅
Parce que si le numéro sort… ils gagnent tous 400 000 €, la fête est totale. Sauf pour vous, qui avez voulu économiser 20 €. Une situation franchement désagréable, non ? Alors, quels numéros choisir ? En théorie, tous ont exactement la même probabilité de sortir, partout dans le pays. Mais comme toujours, il y a le mythe des stats gagnantes
Sur 214 tirages, la terminaison 5 est celle qui est sortie le plus : 32 fois.
La terminaison 1 est la moins sortie : 8 fois.
Et bien sûr, en plus du gros lot, il existe d’autres gains :
125 000 €
50 000 €
20 000 €
6 000 €
1 000 €
etc.
Il y a aussi des gains “indirects”. Exemple : vous avez le numéro 45088 et que le gagnant est 72038 → vous récupérez 20 €, soit le remboursement du ticket parce que vous avez le dernier numéro de bon.
D’autres gains sont attribués selon les deux derniers chiffres, les trois premiers, etc. Au total, la probabilité de gagner quelque chose ou récupérer sa mise monte à environ 15 %.
Le mythe du Gordo qui vous change la vie
Sauf que… le coût de la vie a explosé. Avant, gagner à la loterie faisait de vous une personne richissime. En 1957, cela pouvait permettre d’acheter 10 maisons et 10 voitures.
Aujourd’hui, 400 000 € (environ 328 000 € après impôt) ne suffisent plus forcément à acheter un bien immobilier dans les 5 plus grandes villes espagnoles.
Et à Minorque ?
À Minorque, le numéro gagnant (celui qui vaut 400.000 €) est tombé 3 fois dans l’histoire. Ce n’est pas énorme depuis 1812… mais l’espoir fait vivre. Chaque année, des dizaines de milliers de Minorquins jouent avec ferveur en se disant :
“Este año, nos va a tocar.”(“Cette année, on va toucher le gros lot! ”)
Le détail des premiers prix est le suivant:
1935, à Ciutadella avec le numéro 25888
1944, à Alaior avec le numéro 33307
2023, à Ciutadella avec le numéro 88088 : un premier prix “partiel”, c’est-à-dire qu’il y a eu 49 tickets gagnants dans la ville, le reste ayant été vendu dans d’autres provinces d’Espagne.
La prochaine fois que vous venez à Minorque (ou ailleurs en Espagne), pensez-y : poussez la porte d’un bureau de loterie et prenez un décimo. Pour 20 €, vous ne “tentez” pas seulement votre chance… vous participez à un rituel national, entrez dans la culture espagnole. Pour finir, je vais vous faire une confidence : Me ha tocado el gordo en 2009 !
Quoi, Cédric, tu as gagné 4000.00 € ? Pas tout à fait… mais oui, j’ai gagné un gros lot, encore plus magique : mon fils est née le 22 décembre !




Joyeux anniversaire à votre fils et bonne chance aux minorquins !! Bonnes fêtes à tous